• Ce que le 7 janvier 2015 m'a appris...

    Cela fait un an aujourd'hui que la France a pris une douche froide (glacée...) à la suite des attentats perpétrés à Charlie Hebdo. Comme vous tous je pense, je suis passée par des phases de tristesse, de stupeur, d'incompréhension, de colère, de peur. Ce soir j'ai envie de prendre la plume pour un dernier hommage à Charlie Hebdo et vous expliquer tout ce qui a changé en moi depuis ce fameux 7 janvier 2015...

     

    Déjà, ce que Charlie Hebdo m'a appris en premier c'est... Charlie Hebdo. Je connaissais ce journal surtout de nom, mais c'est suite aux attentats que j'ai appris à mieux le connaître et à mieux comprendre l'humour de ses journalistes et dessinateurs. Je ne suis pas toujours d'accord avec certains dessins qui à mon avis mettent beaucoup d'huile dans le feu, mais j'admire complètement la puissance de la cause qu'ils défend(ai)ent.

     

    Ensuite, j'ai découvert pour la première fois qu'un événement pouvait briser le cœur de millions de personnes d'un seul coup. J'ai beau chercher dans ma (jeune!) mémoire, je ne vois pas d'équivalent à une telle claque. Il y a bien eu le 11 septembre 2001, mais même si ça m'avait beaucoup affecté, je n'avais pas ressenti la même puissance d'émotions. Jamais je n'avais pleuré à l'unisson avec mes 66 millions de compatriotes.

     

    J'ai compris également ce jour là à quel point l'ignorance pouvait être un fléau. Comment peut-on assassiner des journalistes juste parce qu'on n'est pas d'accord avec leurs opinions ? Comment peut-on interpréter aussi aléatoirement les textes de religion ? Ma seule consolation, c'est que j'ai aussi compris à ce moment là de quel côté de la barrière je me situe.

     

    Jamais je ne me suis sentie aussi française que ce 7 janvier 2015. J'ai beau vivre aux US depuis 4 ans et demi, j'ai beau adorer ce pays et ses habitants, j'ai beau râler contre les râleurs en France, je sais désormais où est mon cœur. Tout de suite me vient l'image d'un arbre : au gré des vents et au fil du temps ses feuilles papillonnent, s'envolent, se renouvellent... mais ses racines se ressourceront toujours dans la même terre nourricière, celle qui a vu la jeune graine pousser et grandir. C'est pareil pour moi : mon terreau est là-bas, et c'est le seul pays où je pourrai toujours retourner me ressourcer. J'ai découvert que la France est pour moi parfaite dans ses imperfections et que ça restera toujours mon pays.

     

    Enfin, ce que j'ai compris ce 7 janvier 2015, c'est que "Je ne suis pas Charlie". Déjà parce que c'est dans ma nature d'être un peu à contre-courant, ensuite parce que je considère que je ne suis pas à la hauteur d'un tel slogan. Le jour où je me regarderai droit dans une glace en me disant que par mes actions je fais avancer la liberté et reculer l'ignorance sur cette planète, alors je serai Charlie... Ce jour n'est pas encore là mais j'y travaille...

     

    Bien sûr, en écrivant tout cela résonne en moi cette deuxième date fatidique du 13 novembre 2015. Cette date qui a fait découvrir aux yeux du monde que la France est un pays qui se sent mal. Après Charlie Hebdo, je me souviens avoir été isolée dans ma peine, entourée par des américains qui passaient une journée du quotidien semblable à tant d'autres. Après les attentats du Bataclan, j'ai été assaillie de questions et j'ai été très touchée par les regards compatissants et les questions concernant ma famille et mes amis. Pour tout vous avouer, depuis notre retour de France samedi dernier, les américains me posent sans arrêt la même question : "Est-ce que vous avez senti un changement dans votre pays ? Comment sont les gens ? Est-ce qu'ils ont peur ?". J'ai l'impression que je reviens d'un pays en guerre. Mais est-ce si loin de la vérité ? N'est-on pas en train de commencer une guerre contre la haine ?

     

    Je ne sais pas si cet article résonne en vous, mais j'aimerais bien savoir comment ce 7 janvier 2015 vous a transformé. Qu'avez-vous découvert ? Qu'avez-vous appris ? Avez-vous peur ? Êtes-vous en colère ? Je peux vous raconter mon ressenti depuis ici, mais je n'arrive pas à approcher le ressenti des français vivant en France. Racontez moi ce qu'il s'est passé pour vous depuis un an...

     

    Pour relire les 3 textes que j'ai écrit les jours suivants les attentats, c'est ici, là, et là.


    Tags Tags :
  • Commentaires

    1
    bopapapy
    Samedi 9 Janvier 2016 à 08:09

    Depuis le temps que je traîne mes années au milieu des malaxeurs d'intentions, j'ai appris à m'attarder sur une question utile aux enquêtes : A qui profite le crime.

    Les auteurs des assassinas commis en 2015 sont identifiés, mais derrière ces atteintes à l'intégrité d'une nation, il y a aussi des beaux parleurs qui continuent à faire mijoter la PEUR, afin qu'une grande partie de la population ait l'esprit préoccuper... et pendant ce temps, on en profite pour nous entuber...

    En dehors de cet aspect politique, je sens naître un rapprochement, voire une curiosité de l'autre, dans cette France qui, depuis toujours, a bâtie sa culture à partir de tant d'horizons...

     

    2
    chantalepic
    Samedi 9 Janvier 2016 à 08:29

    les gens disent "même pas peur" mais en réalité je crois que ce n'est pas le ressenti ,en tous les cas moi j'ai un peu la trouille ,car ces tarés n'ont aucuns scrupules !!

     

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    3
    Samedi 9 Janvier 2016 à 23:05

    Merci d'avoir pris le temps de répondre, ça me permet de voir un peu mieux ce qui se dit en France !

    4
    Laetitia
    Dimanche 10 Janvier 2016 à 15:47

    Ici, on continue de vivre, car tout ne peut pas s'arrêter... mais, on a tendance à s'inquiéter un peu plus plus, à ne pas réagir pareil quand il se passe quelque chose...

    J'ai évité d'aller sur Paris juste après, mais mon mari y travaille, on n'arrête pas de vivre, on vit et on profite ! Mais dans le quotidien, on fouille nos sacs quand on va faire les courses, les conseils "que faire en cas d'attentat" sont affichées et me fichent un peu la trouille...

    Je n'oublie pas, je continue à vivre, mais pas tout à fait comme avant, pas avec l'insouciance que j'avais qui a un peu disparu, et j'ai peur pour mes enfants : dans quel monde vont-ils grandir ?

    C'est un peu décousu ce que je raconte... désolée...

      • Mardi 12 Janvier 2016 à 03:04

        Mais non ce n'est pas décousu, c'est même très bien expliqué et tout à fait logique. Merci de m'avoir partagé ton ressenti, ça m'éclaire sur ce qui se passe en France !

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :